Tugdual Derville confie à La Croix sa réaction à la lecture de la longue interview accordée par le pape François aux revues jésuites.
« Sa liberté de ton, sa capacité à parler de lui, y compris pour exprimer ses limites, à partager son histoire avec humilité est magnifique et très libératrice en même temps. Son souci de consulter, sa manière de reconnaître ses problèmes d’autoritarisme, tout cela est très sain. C’est beau de sentir un homme qui est à la fois un grand intellectuel – la plupart de ses références me dépassent – et qui inscrit son regard sur la pastorale dans la consolation et la proximité. Le risque est toujours de tirer « la couverture du pape » à soi, mais son invitation à commencer par le bas, son côté pragmatique, humble me rejoint beaucoup.
Je sens beaucoup ce besoin de consolation, de miséricorde, une miséricorde qui ne signifie pas un oubli de la souffrance ou du péché, mais qui est un cœur penché sur la misère. La tendance naturelle, c’est de confondre l’acte et la personne. C’est pour cela qu’à Alliance VITA, nous commençons par rencontrer les personnes, les écouter : plus on est engagé dans les services d’aide, plus on marche sur des œufs. On réalise qu’il ne nous appartient pas de juger mais seulement d’aider à grandir.
Au fond, je trouve dans sa pensée sur la miséricorde une cohérence, et même une continuité avec Benoît XVI, de même que sur l’idée d’une “pensée ouverte” (Benoît XVI parlait d’une “raison ouverte”), là encore une incitation à dialoguer même avec les plus lointains de mes adversaires ! Je suis d’accord avec lui aussi sur le fait que certains sujets graves, comme l’avortement, ne doivent pas devenir “obsessionnels” : j’ai cette préoccupation de me soucier de tout l’homme et pas seulement à un stade uniquement de son développement… On sent que ce qui anime le pape François, c’est le regard posé sur la personne. De cette manière, il dédramatise aussi certains enjeux. Et avec son image de “l’hôpital de campagne”, il nous montre l’espérance. François, c’est le pape de la consolation ! »
Recueilli par Anne-Bénédicte Hoffner