Je n’ai pas d’avis sur le Professeur Didier Raoult. J’avoue mon incompétence croissante. Et pourtant, je regardais ses vidéos bien avant l’arrivée officielle du Covid-19 en France. Le personnage me fascinait. Son look – au cinéma, on dirait sa gueule – sa façon de rassurer sur le ton de l’évidence, dans la tempête. On a envie de le croire. Son cran est si absolu qu’on hésite entre mégalomanie et génie. C’est un ponte, nul ne le conteste. Le président en personne s’est déplacé pour le rencontrer. Il l’a nommé à son conseil scientifique, dont il a démissionné. Mais j’allais oublier l’essentiel : contre la pandémie, qu’il a certes sous-évaluée au début, Didier Raoult dit avoir LA solution : un produit, basique, connu, référencé, l’hydroxychloroquine.
Alors, pour ou contre ? Les camps s’affrontent, épousant les sensibilités régionales ou politiques. Feuilleton haletant. Du temps où l’on y jouait encore au football, on disait qu’il y avait en France 50 millions de sélectionneurs de son équipe nationale, ce qui rendait la vie du titulaire difficile. Et l’antagonisme brûlait entre Paris et Marseille. Nous y sommes.
Les cérémonies du ballon rond sont interdites, mais une nouvelle religion est apparue. Elle a son dieu, hyper-médiatisé, et ses adeptes. Son but est moins dérisoire que de mettre une balle au fond des filets : il faut expulser du terrain un virus mortel. Et il semble qu’il n’y a qu’un joueur. Qu’on le prenne pour un sauveur ou un charlatan, il est devenu la référence des grands de ce monde ; il force les autorités à se positionner. Tour à tour interdit et courtisé, il drible.
On l’a cru plusieurs fois terrassé. Son produit miracle, au mieux ne donnait rien, au pire augmentait la mortalité. Mais il a tenu, avec sa posture déconcertante d’agressivité tranquille. Ceux qui pensaient le démasquer seront-ils ridiculisés ?
Dernier épisode, trois des auteurs de l’article du Lancet, la prestigieuse revue, qui prétendait « prouver » la dangerosité de « sa » molécule se sont rétractés. Scandale ! Le gouvernement Français et l’OMS qui brandissaient le carton rouge ont dû avaler leur sifflet. Les fans de Raoult vont-ils triompher ? Il dit : « Je suis l’élite » et tacle les journalistes : « Encore une fois, vous n’allez pas comprendre… » Aptes à commenter le football, souligne-t-il, mais incapables, en matière de science, de distinguer les stars des tocards. Lui se compare à Mbappé ! Moi, je lui décerne le ballon d’or de la communication.
Pour le reste, Didier Raoult a raison : je n’y comprends strictement rien.
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