Le Comité consultatif national d’éthique vient de livrer son bilan des états généraux qu’il organise depuis cinq mois. Au menu : débats en régions, auditions nationales, contributions et votes sur internet… Qu’en tirer ? Cette montagne a déjà accouché… d’un sourire, celui de Jean-François Delfraissy. Le président du Comité d’éthique se réjouit qu’on ait si largement ouvert les débats. Mais son enthousiasme pour un processus qui aboutit, à chaque révision, à effondrer des digues que la loi précédente avait prétendu ériger m’interroge. Cette bioéthique du glissement continu ne finit-elle pas par noyer dans un océan d’incertitude une société en mal de repères sécurisants ?
C’est bien ce constat qui ressort des États-Généraux : la plupart des Français qui s’y sont impliqués plaident pour des repères stables. Ils craignent surtout l’abandon du critère de l’infertilité médicalement constatée pour accéder à la procréation médicalisée. Du coup, les promoteurs de cette nouvelle transgression tentent trois contre-feux.
D’abord, expliquent-ils, ce n’est pas la quantité des votes qui compte, mais la qualité des arguments. Justement, ceux qui résistent à la chosification de l’enfant posent un regard altruiste étayé sur la bioethique. La pertinence de leurs arguments est peu contestable.
Ensuite, ajoute-t-on, un surinvestissement des catholiques aurait biaisé la consultation. Comme si on avait demandé un certificat de baptême aux participants ou leur profession de foi ! En réalité, le christianisme se soucie du bien commun. Qui reprochera à ses fidèles de défendre le plus fragile ?
Enfin, les leaders LGBT (qui ne représentent qu’une partie des personnes homosexuelles) affirment que, si leurs militants ont été si peu nombreux à s’exprimer, c’est qu’ils sont intimidés par la virulence de leurs opposants. Il faut avoir assisté aux réunions en régions pour mesurer à quel point la ficelle est grosse. Sans oublier que les votes sur internet sont libres.
Finalement, c’est bien le petit nombre de personnes engagées pour l’extension de la PMA ou pour la GPA qui saute aux yeux. Ces revendications sont catégorielles : ultra-minoritaires, elles sont portées soit par certains « procréateurs » qui contournent déjà la loi, soit par des personnes qui demandent à la loi de justifier leurs choix personnels.
Le président de la République devra trancher. Il ne peut plus ignorer le rapport des forces et des convictions qui s’est établi : la PMA « sans père » divise les Français, suscite une résistance solide et peu d’adhésion.