Nous sortons à peine de l’état de guerre sanitaire. Ailleurs, surgit le spectre d’une deuxième vague de contamination ; ici, c’est la panique économique. Les experts évaluent tout ce que cela va coûter : faillites, perte d’emplois, surcroît d’impôts ou de travail. On ne fait pas seulement les comptes, on les règle. L’État a tâtonné, manipulé l’opinion – pour son bien, osent certains. On débat de ce qu’il faut faire pour enrayer la crise. Tout est remis à plat : enseignement, culture, transports, libertés publiques… Et bien sûr financement de la santé et de la dépendance…
On parle du monde d’après, d’un autre monde. Le président de la République annonce une révision de cap. Qui l’eut cru ? Même sa réforme des retraites est enterrée. Il dit avoir changé. Sa vision de la globalisation évoluerait… Des produits essentiels ont manqué ou tardé : masques, médicaments… Mais comment retrouver un zeste d’indépendance nationale – surtout vis-à-vis de la Chine ?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le pouvoir en place a du pain sur la planche. La récession qui pointe serait comparable à celle de 1929. Les plus jeunes vont-ils la subir de plein fouet ? Qui embauchera des apprentis ? Déjà les étudiants peinent à trouver des stages ou des alternances. À l’autre bout de la vie, le drame des personnes âgées dépendantes est un défi social et financier. La société tout entière doit retrousser ses manches. Mobilisation nationale, supplie le Président qui appelle à l’unité républicaine face aux affrontements et clivages qui divisent le pays.
Une session extraordinaire du Parlement est convoquée au début de l’été. Il faut aller au plus prioritaire. Et devinez ce que nous programme l’exécutif dès la première semaine de juillet ? Derrière les grands mots rassembleurs, l’agenda concret sur lequel vont plancher les députés se révèle clivant. Thème imposé : la sacro-sainte bioéthique. Cette bioéthique en folie libertaire qui entend – entre autres – faire financer par une assurance maladie exsangue la fabrication artificielle d’enfants sans pères ! Indubitablement, le sujet divise, et 7 français sur 10 se disent hostiles à son retour précipité dans l’hémicycle. Seulement 1% l’estime prioritaire, mais ce petit lobby bien en cour l’a exigé et vite obtenu.
Je ne fais pas de politique partisane, mais si, dans l’état de crise actuel, la priorité du pouvoir est de légaliser ce qui reste aux yeux de beaucoup une grave injustice, j’estime qu’il piétine la concorde nationale dont il se réclame. La paix comme l’unité exigent la justice.
Une réflexion au sujet de « Abus de priorité (19 juin 2020) »