À quoi doit s’employer aujourd’hui un ministre ? Le bon sens répond : aux conséquences de la crise sanitaire qui n’est pas achevée, aux inquiétudes, aux angoisses des Français. Il ne faut donc pas s’étonner de la quasi-absence des ministres aux séances de la commission spéciale qui prépare le second passage à l’Assemblée nationale de la loi dite « bioéthique », que le gouvernement a cru bon programmer à cette session extraordinaire.
Or, le président de la République a choisi de nommer Jean-Louis Tourraine, l’un de ses députés le plus transgressifs, comme rapporteur du projet de loi. Quand le chat n’est pas là, les souris dansent : en quelques heures la bioéthique a encore gravement dérapé. Je n’insisterai pas sur la PMA sans père à propos de laquelle les encadrements introduits par le Sénat ont vite été dissous. La commission entend qu’elle soit remboursée par la sécurité sociale, pour toute femme seule ou vivant à deux, sans aucun motif d’infertilité médicale.
Mais cette PMA dont on a trop exclusivement parlé est l’arbre qui cache la forêt : après des d’années de concertation, où nous avons pu mettre en garde, en plus haut lieu, contre la chosification de l’être humain par l’individualisme, la technique et le marché, voilà où l’on en est à l’heure qu’il est : la commission a introduit la possibilité pour deux femmes d’obtenir une fécondation in vitro utilisant du sperme d’un donneur anonyme, l’ovocyte de l’une des femmes et l’utérus de l’autre, ce qui impose à l’enfant la dissolution de toute paternité et l’éclatement de la maternité. Avec ce genre de montage procréatif, résister à la gestation par autrui deviendra difficile.
Elle a réintroduit le « bébé médicament », cette technique doublement eugéniste de tri des embryons en vue de faire naître un « sauveur » d’un enfant déjà né, qu’avait pourtant enfin supprimée l’Assemblée nationale en première lecture. Il faut en moyenne 39 embryons pour faire naître cet hypothétique sauveur. Elle a étendu le tri des embryons à de nouveaux critères, indépendamment d’une maladie héréditaire connue, faisant franchir une nouvelle étape au fantasme du bébé parfait. Elle a même réintroduit la possibilité de fabriquer les chimères homme-animal, par adjonction de cellules souches issues d’embryons humains à des embryons d’animaux, au prétexte de la recherche. La frontière homme / animal est attaquée.
Le gouvernement a pour le moment perdu le contrôle du processus législatif. Est-ce à dessein ou parce qu’il est débordé ? Réponse la semaine prochaine…